Leçons sur l'histoire (I)
Sommaire
Pour commencer ces leçons sur l’histoire, il est nécessaire de définir de quoi nous parlons, tant le terme « histoire » est polysémique. L’histoire est d’abord une enquête. C’est le sens du mot en grec : quand Hérodote (484-425 AC) écrit une Historia, il se veut l’histor, celui qui sait, celui qui donc peut témoigner. Le premier paragraphe de cette œuvre fondatrice de l’histoire le dit :
Hérodote d’Halicarnasse présente ici les résultats de son Enquête afin que le temps n'abolisse pas le souvenir des actions des hommes et que les grands exploits accomplis soit par les Grecs, soit par les Barbares, ne tombent pas dans l’oubli ; il donne aussi la raison du conflit qui mit ces deux peuples aux prises.1
Témoigner pour que le temps n’abolisse pas le passé. Voilà ce qu’est d’abord l’histoire, au sens le plus commun. Mais cette connaissance des faits passés ne résume pas le travail de l’historien. Il lui faut aussi chercher la raison, c’est-à-dire, en suivant le texte grec au plus près, ce qui a engendré les évènements historiques. Le récit que compose l’historien est donc une mise en ordre qui constitue l’histoire proprement dite.
Qu’appelle-t-on histoire ?
C’est que l’histoire en effet se présente sous une double face. On a coutume de dire que le mot a deux sens : la réalité de l’ensemble des évènements passés et la connaissance que nous avons de cette réalité. Il faudrait donc éviter de confondre les deux plans et même on pourrait employer deux termes différents.
L’homme, être historique
En allemand, il y a deux termes : Historie qui désigne la connaissance des faits et Geschichte pour l’histoire qui advient. Cette façon de voir satisfait notre goût des classements et la revendication de l’unicité de sens des mots sans laquelle nous serions voués à la confusion, au malentendu et à l’erreur. Mais même en allemand, les choses ne sont pas aussi claires. Les Allemands utilisent aussi Geschichte pour parler de la connaissance historique. Si un Historiker est bien un spécialiste de l’histoire, historisch est très souvent employé comme un synonyme de Geschichtlich. Pour Hegel (1770-1831), cette distinction n’a pratiquement aucun sens. L’histoire est philosophique parce qu’on ne peut pas comprendre les évènements du passé sans en chercher la raison immanente. Ainsi la distinction entre la réalité et sa connaissance, distinction toujours problématique d’ailleurs, puisque nous ne pouvons parler d’une réalité qu’en ayant au moins un début de connaissance, convient encore plus mal pour l’histoire.
On peut en effet admettre que la nature existe indépendamment de sa connaissance : le réquisit de la physique est que la nature physique existe en dehors de nous, indépendamment de la connaissance que nous en avons. Il y aurait beaucoup à dire concernant les problèmes gnoséologiques que cela soulève, mais pour l’heure nous laisserons de côté cet aspect de la théorie de la connaissance.
Il en va autrement pour les « affaires humaines ». Sans la conscience d’être « historiques », c’est-à-dire sans ce rapport si particulier avec la mémoire et le récit de leur propre passé, les hommes n’existeraient que comme les choses de la nature et par conséquent n’auraient pas d’histoire. Mais si l’homme est un être historique, ce n’est pas un caractère qui s’ajouterait à ses caractères naturels (mammifère plantigrade, etc.), c’est parce qu’il existe « pour soi », pour reprendre une expression de Hegel. On peut encore dire qu’il existe « comme esprit », ou, ce qui est la même chose, qu’il est libre. Être historique et être libre, c’est au fond la même chose: voilà une thèse qui nous guidera pour la suite de nos réflexions sur l’histoire.
Histoire et évènement
Autrement dit, les hommes n’ont une histoire que parce qu’ils la pensent et la racontent. Mais cette nécessité de raconter l’histoire tient à une autre raison. Sans le récit, les évènements du passé sont irrémédiablement perdus, car ce qui fait que l’existence humaine est proprement historique, c’est qu’elle est constituée d’évènements absolument singuliers, d’évènements qui ne se répètent pas. Rien ne se répète à l’identique – Marx (1818-1883) dit ironiquement que l’histoire se répète toujours deux fois, la première comme tragédie et la seconde comme farce. À la différence des processus physiques, l’évènement historique n’est pas prédictible et personne n’a de maîtrise sur le cours de l’histoire – les sciences de la nature, depuis Descartes, ont la prétention de nous rendre « comme maîtres et possesseurs de la nature », mais il n’y a rien de tel avec cette science humaine par excellence qu’est l’histoire. Certes, les hommes sont les sujets de l’histoire en ce sens qu’ils agissent en fonction de leurs désirs et des calculs qu’ils effectuent en vue d’atteindre leurs propres objectifs : on pourrait se dire qu’en connaissant la nature humaine et les lois de ces calculs humains, il serait possible de prédire le futur pour chaque individu. Mais même si l’action ou la réaction des individus étaient susceptible de prédiction, l’action de chaque individu entre en collision avec les actions des autres hommes et le cours des choses naturelles, et la résultante de toutes ces actions indépendantes échappe au calcul. Et donc, comme le dit Engels (1820-1895), ce qui advient dans l’histoire, c’est ce que personne n’a voulu.
Histoire naturelle et histoire humaine
On peut parler non seulement d’une histoire humaine mais aussi d’une histoire naturelle. Dans ce cas, on n’emploie pas seulement le mot « histoire » dans son sens grec d’enquête – comme dans l’Histoire des animaux d’Aristote (382-322 a.c.). Depuis le xviiie siècle, on a largement admis que la nature ne pouvait être conçue simplement sur le mode de l’éternelle répétition du même. Kant (1724-1804) entame pratiquement sa carrière philosophique avec une Histoire de la nature et théorie du ciel, qui vise deux objectifs :
Découvrir le lien systématique qui réunit, dans toute l’étendue de l’infinité, les éléments de grande dimension de la création, déduire la formation des corps célestes eux-mêmes et l’origine de leur mouvement, à partir du premier état de la nature au moyen de lois mécaniques … 2
L’immense Histoire naturelle de Buffon (1707-1788), qui couvre la géologie, l’ensemble du vivant et même la démographie humaine, prend en compte cette dimension historique. Buffon est l’un des premiers à affirmer que l’âge de la Terre est de loin supérieur à celui que donnait la Bible et que les fossiles sont des témoins d’espèces aujourd’hui disparues. Charles Lyell (1797-1875) pour la géologie, Lamarck (1744-1829) et Darwin (1809-1882) pour le vivant, les développements contemporains de l’astronomie permettent de commencer à construire une histoire scientifique de la nature.
Un courant important de scientifiques et de philosophes tente de réinsérer l’histoire humaine dans l’histoire naturelle, la culture et la technique humaines apparaissant alors comme autant de moyens utilisés par notre espèce pour s’adapter aux modifications de l’environnement. La paléontologie humaine est totalement insérée dans la paléontologie générale.
Cependant, cette naturalisation de l’histoire humaine se heurte à la réalité anthropologique de l’homme. On peut bien étudier les mœurs des sociétés humaines à la manière dont les spécialistes d’éthologie étudient celles des fourmis ou des oies, il semble bien qu’il y ait une limite infranchissable, même si la vie sociale tend à domestiquer les humains et rendre plus réguliers leurs comportements. Freud (1856-1939) souligne le conflit indépassable entre la culture et la poussée individuelle à la liberté :
La poussée à la liberté se dirige donc contre des formes et des revendications déterminées de la culture ou bien contre la culture en général. Il ne semble pas qu’en exerçant une quelconque influence on puisse amener l’homme à muer sa nature en celle d’un termite, il défendra sans doute toujours sa revendication de liberté individuelle contre la volonté de la masse.3
L’histoire naturelle traite de la dynamique des choses inertes ou de l’évolution des espèces. Mais l’histoire humaine n’est pas réductible à une histoire de l’espèce : elle est constituée par l’action des individus qui partent de leurs propres buts, jugent d’après leur propre décret et ne peuvent être réduits à des pantins qui seraient mus par un manipulateur tout puissant ou par une machinerie ingénieuse. Il en est précisément ainsi parce que leur histoire ne leur est pas en quelque sorte extérieure, elle n’est pas un point de vue en surplomb de leur propre action, mais elle est « leur » histoire, pensée et réfléchie dans leurs esprits individuels.
Certes, cette liberté n’est pas absolue. Les individus sont pris dans des situations qu’ils n’ont pas créées, ils n’agissent jamais en faisant table rase du passé. Les conditions de leur action, ils les trouvent toutes faites, produites par l’action des générations passées. Mais il s’agit seulement d’un conditionnement et non d’une détermination analogue à la causalité naturelle, ni de processus aléatoires comme les mouvements des molécules d’un gaz ou les mutations génétiques. Sans doute les conditions matérielles et politiques expliquent-elles partiellement pourquoi un peuple de pasteurs et de nomades installé sur les terres de Canaan invente une nouvelle religion monothéiste. Mais sur la base de ces conditions, de multiples possibilités s’offraient à ces hommes, y compris celle de ne pas inventer une religion monothéiste avec un Dieu aussi abstrait que celui de la Torah4. Les institutions sociales, celles qui donnent sang et chair à l’histoire humaine, peuvent être considérées comme les créations d’une imagination radicale, ainsi que le soutient Cornélius Castoriadis (1922-1998).5
L’homme, enfin, ne peut exister que dans un monde construit par les hommes, un monde où il peut se retrouver lui-même, un monde d’institutions qui permettent au petit d’homme d’entrer dans la vie des humains en apprenant à parler et à se référer à la loi, un monde aussi où les œuvres d’art manifestent objectivement, c’est-à-dire face à la subjectivité de chaque individu la réalité de l’esprit humain. Que l’homme soit un être « social historique » et qu’il soit un fabricant d’œuvres d’art, ce sont là deux caractères qui n’en font peut-être qu’un seul et constituent la matière même de l’histoire. L’histoire ne serait alors qu’une des modalités, peut-être la plus importante, selon lesquelles l’homme se réfléchit lui-même.
C’est encore cette historicité propre à l’homme que Nietzsche (1844-1900) souligne au début de sa seconde Considération inactuelle :
L’animal, en effet, vit de manière non historique : il se résout entièrement dans le présent comme un chiffre qui se divise sans laisser de reste singulier, il ne sait simuler, ne cache rien et apparaissant à chaque seconde tel qu’il est, ne peut donc être que sincère. L’homme, en revanche, s’arcboute contre la charge toujours plus écrasante du passé, qui le jette à terre ou le couche sur le flanc, qui entrave sa marche comme un obscur et invisible fardeau.6
Notons cependant que la manière dont Nietzsche pose la question de l’historicité de l’être humain est pratiquement opposée à notre première manière de la définir. Là où l’histoire est comprise comme la manifestation de la liberté humaine, Nietzsche y voit un fardeau. Parvenue à un certain degré, la « rumination historique » peut tuer l’individu comme le peuple. L’amnésie est terrible : le sujet ne sait plus qui il est. Mais ne rien oublier serait peut-être encore plus insupportable : l’oubli est aussi vital que la mémoire. Il en va de même pour l’histoire : privés d’histoire les hommes cesseraient d’être humains, mais ils doivent aussi savoir tourner la page, « laisser les morts enterrer leurs morts » et tenter de s’arracher à l’histoire.
La préhistoire de l’histoire
Pour cette raison, celui qui veut « penser l’histoire » ne peut se limiter à l’histoire savante, celle que nous avons hérité des Grecs (Hérodote, Thucydide, Polybe) et des Romains (Tite-Live, Salluste, etc.). L’épopée, ces vastes récits des origines dont chaque civilisation se dote, appartiennent à une véritable protohistoire.
Une protohistoire ?
Giambattista Vico, philosophe napolitain et auteur de la Science Nouvelle (publiée en 1725 et remaniée en 1744) interprète des mythes et des fables qui deviennent autant de documents historiques, puisque « les fables ont été des histoires vraies et sérieuses des coutumes des très anciens peuples de la Grèce » (Science Nouvelle 1744, §7).
À l’encontre de saint Augustin, sévère contempteur de fables de la mythologie surtout remarquables par leur obscénité, les principes de la science nouvelle permettent d’éviter cet inconvénient en montrant que
de telles fables furent à leur commencement toutes vraies sévères et dignes des fondateurs des nations, et que c’est ensuite, quand de longues années se furent écoulées, qu’elles prirent les significations obscènes avec lesquelles elles nous sont parvenues, en partie à cause de l’obscurcissement de leur signification, en partie à cause du changement des mœurs qui, de sévères qu’elles étaient, devinrent dissolues, et parce que les hommes voulaient pour rassurer leur conscience, pécher avec l’autorité des dieux. (op. cit. §81)
Vico donne une explication de la vérité des fables anciennes :
… les premiers hommes du paganisme étaient aussi simples que des enfants, qui sont véridiques par nature, les premières fables ne purent rien inventer de faux : aussi durent-elles être nécessairement (…) vraies. (op.cit. §408)
Sans aller jusque là, il est tout de même raisonnable de considérer les mythes et les fables antiques comme des documents historiques, à l’expresse condition de les interpréter correctement.
L’épopée de Gilgamesh7 pour la civilisation mésopotamienne, l’Iliade et l’Odyssée pour la Grèce appartiennent à ce genre. Mais les livres sacrés comme la Torah (la première partie de la Bible hébraïque) pour les Juifs ou le Mahâbhârata pour les Hindous, s’ils comportent une dimension religieuse essentielle sont aussi des récits qui établissent l’histoire à partir de laquelle un peuple peut se penser. Otto Bauer (1882-1950) définissait une nation comme « une communauté de vie et de destin ». Le « récit des origines » qu’on retrouve dans ces œuvres est précisément ce par quoi les membres de la nation apprennent ce qu’est cette communauté de vie et de destin.
La Torah (appelée également Pentateuque parce qu’elle regroupe « les cinq livres de Moïse ») raconte l’histoire du peuple d’Israël depuis la création du monde jusqu’aux adieux de Moïse au peuple d’Israël. Les livres des « premiers prophètes » racontent la suite de cette histoire, de la traversée du Jourdain et la conquête de Canaan à l’ascension et à la chute des royaumes israélites. Seuls les livres des « derniers prophètes » et les « Écrits » contiennent des textes à valeur purement morale et religieuse, où la dimension historique disparaît pratiquement.
On peut aborder la lecture de la Bible uniquement à partir de sa valeur spirituelle en considérant les histoires qu’elle raconte comme des paraboles dont l’interprète doit dégager la signification. Ainsi, Spinoza (1632-1577) considère ainsi qu’il s’agit de récits qui visent à instruire le vulgaire en frappant l’imagination. Mais on peut aussi les considérer comme l’invention d’une histoire qui donne à un peuple un passé commun glorieux, qui lui donne son unité et sa réalité spirituelle. Peu importe alors la vérité factuelle. Les historiens et les archéologues n’ont pas trouvé trace du voyage d’Abraham conduisant sa famille d’Ur vers les terres de Canaan. Pas plus de traces sérieuses pour attester le caractère historique de la sortie d’Égypte sous la direction de Moïse.8 Ce n’est pas pour autant un ensemble de fables (au sens de récits mensongers) ou de contes pour les enfants. On pourrait parler de « légende » : la légende désigne ce qui est à lire ou dire. Le mot « légende » est d’abord employé pour désigner le récit de la vie des saints, ce qui est « legendum », « à lire ». La légende d’une carte ou d’un dessin indique ce qui doit être lu sur cette carte ou ce dessin pour qu’il ait du sens.
Histoire et écriture de l’histoire
On fait remonter l’histoire à l’écriture – c’est l’invention de l’écriture qui permet d’opérer la séparation entre préhistoire et histoire. Avant l’invention de l’écriture, nous ne disposons pas de documents qui permettent d’aller au-delà des conjectures que permettent de formuler les vestiges archéologiques de l’habitat, des outils, des objets fabriqués. Au contraire, les tablettes sumériennes ou les écrits des scribes égyptiens nous donnent une vision parfois presque claire de ces civilisations disparues il y a si longtemps. Mais l’écriture ne nous laisse pas seulement des documents, elle nous laisse l’écriture de l’histoire, même quand cette histoire est très largement mythique.
Peut-être faut-il élargir le propos et ne pas s’en tenir à ces données qui creusent trop la rupture instituée par la révolution de l’écriture. L’histoire se donne dans des textes, mais ce ne sont pas seulement des textes écrits. D’une part, ce qui est écrit a souvent vécu très longtemps auparavant sous une forme orale et l’on peut considérer que la tradition orale fonctionne longtemps à la manière du texte écrit. D’autre part, le rapport au récit historique n’est pas seulement langagier. Les œuvres d’art, monuments, statues, etc., mais plus généralement toutes les œuvres durables de l’activité humaine fonctionnent comme des marques où les hommes peuvent « lire » l’histoire des générations passées.
Histoire et mythe des origines
L’inscription des sociétés humaines dans l’histoire n’est sans doute pas d’abord ce qu’elle deviendra plus tard, une recherche des enseignements de l’histoire basée sur une connaissance aussi exacte que possible des faits. Les textes sacrés des grandes civilisations comme les mythes sont des histoires des origines. Chaque peuple, chaque civilisation, trouve dans ces récits l’explication de ce qu’il est, de ses lois, de ses mœurs ou de sa langue. Si l’on considère l’histoire comme nous la considérons aujourd’hui, c’est-à-dire depuis la fin du xixe siècle, comme une science humaine ou sociale, la recherche des origines n’a guère de sens : l’origine est toujours mythique – Marc Bloch (1886-1944) dénonçait « l’obsession des origines ». Il ne s’agit pas seulement de savoir si l’Exode a réellement eu lieu ou si le père de tous les membres de la tribu est un léopard ou un ours. Même quand l’origine se donne comme réalité historique, elle est une reconstitution en vue de produire un récit des origines. Longtemps dans les écoles de la République française, les enfants durent apprendre « nos ancêtres les Gaulois ». Mais les ancêtres des Français ne sont pas plus des Gaulois que des Romains, des Germains, des Arabes, etc. Au demeurant les populations celtiques que les Romains appelaient Gaulois étaient elles-mêmes des populations récemment installées sur le territoire de la Gaule. Ainsi que le montre Claude Nicolet9, la question des origines fut l’objet d’une longue bataille entre historiens, mais aussi et surtout une bataille politique. La noblesse française se prétendait la descendante des guerriers francs (donc des « Germains ») et tenait les paysans et plus généralement les roturiers pour les descendants des gallo-romains vaincus. Cette victoire originelle devait légitimer les privilèges de la noblesse comme une race dominante, une domination fondée sur le principe du sang. C’est seulement à la fin du xixe siècle, notamment avec le Second Empire et la volonté de Napoléon iii de faire de Vercingétorix un héros national et du site archéologique d’Alise Sainte Reine le lieu présumé de la bataille d’Alésia que les Gaulois sont véritablement érigés en ancêtres de la nation. Que la nation soit une nation gauloise et non une nation issue des peuples germaniques comme les Francs, cela avait évidemment une importance politique capitale au moment où la rivalité franco-allemande était devenue le problème majeur en Europe, et ce indépendamment de la vérité historique objective.
On pourrait ainsi multiplier les exemples de ces mythes originels. Toutes les questions de datation renvoient à des mythes concurrents. Quand commence donc l’histoire de France proprement dite ? Est-ce avec le baptême de Clovis, ce rois des Francs dont le nom est germanique (« Chlodwig », c’est-à-dire l’illustre combattant) ? Est-ce avec le traité de Verdun où les petits-fils de Charlemagne se partagent l’empire carolingien entre la Francie occidentale qui deviendra « royaume de France » en 1205, la Francie médiane qui deviendra la Lotharingie et la Francie orientale qui forme le noyau du futur « Saint-Empire Romain germanique » ? Est-ce encore l’avènement de la dynastie capétienne qui impose la règle de la primogéniture et met fin au partage des royaumes à la mort du père selon la vieille tradition franque ? Mais peut-être pourrait-on encore penser que ce conglomérat de provinces aux coutumes et aux langues différentes, réunies de force sous la coupe des descendants d’Hugues Capet ne devient véritablement une nation que lors de la « levée en masse » de 1792 et de la très symbolique bataille de Valmy où l’armée des sans-culottes repousse les monarchies coalisées de toute l’Europe au cri de « Vive la nation ! » ? Il y a autant d’origines que de points de vue, que de rapports subjectifs à la tradition, tout simplement parce que, du point de vue d’une histoire objective, il n’y a pas d’origine !
Il n’est cependant pas toujours facile de distinguer cette histoire mythique d’une histoire fondée uniquement sur la considération de l’exactitude des faits. Tite-Live (59 ac-17) racontant l’histoire romaine est mu par un souci de la vérité qui permet de le compter parmi les fondateurs de la discipline historique telle que nous la définissons aujourd’hui. Cependant, il fait l’histoire de Rome « ab urbe condita », depuis la fondation de la ville, et intègre à cette histoire la fuite d’Énée après la chute de Troie et le mythe de la fondation de Rome par les deux jumeaux Romulus et Remus élevés par une louve. C’est encore de Tite-Live qu’est tirée l’histoire d’Horace.
Il ne faut pas penser que cette manière de procéder serait propre à des historiens qui méconnaissent encore les méthodes de recherche de la vérité en histoire et restent guidés par la volonté de montrer comme la Fortune a veillé sur le destin de Rome. Un grand historien allemand du xxe siècle, Ernst Kantorowicz (1895-1965) consacre en 1927 un important ouvrage à L’Empereur Frédéric II, un livre à la gloire de l’Empereur qui a permis par la fusion des divers peuples germaniques de « donner naissance à l’Allemand, cette créature unique qui contient en elle l’univers »10. L’érudition austère d’un grand médiéviste produit ici un « mythe national » dont l’utilisation politique effraiera un peu plus tard son auteur, d’origine juive, contraint à quitter l’Allemagne et qui refusera, après la seconde guerre mondiale, de faire rééditer son livre, « écrit dans l’excitation des années vingt, avec tous ses espoirs en un triomphe de l’Allemagne cachée et une rénovation du peuple allemand par la contemplation de son plus grand empereur »11.
L’invention de la tradition et l’esprit du temps
C’est qu’en effet, l’histoire des évènements passés est souvent difficile à démêler de la tradition dans laquelle elle s’inscrit. Dans un livre qui a fait date dans l’historiographie contemporaine12, Eric Hobsbawm (né en 1917) montre que :
Des « traditions » qui semblent anciennes ou se proclament comme telles ont souvent une origine très récentes et sont parfois inventées. […]
Les « traditions inventées » désignent un ensemble de pratiques de nature rituelle et symbolique qui sont normalement gouvernées par des règles ouvertement ou tacitement acceptées et cherchent à inculquer certaines valeurs et normes de comportement par la répétition, ce qui implique automatiquement une continuité avec le passé. En fait, là où c’est possible, elles tentent normalement d’établir une continuité avec un passé historique approprié.13
Si nous poursuivons cette inspiration, nous pouvons comprendre pourquoi chaque époque, chaque peuple invente sa tradition et écrit ainsi son histoire. Hobsbawm montre l’importance de ce processus dans les dernières décennies du « long xixe siècle ». Les transformations sociales et institutionnelles dans les États anciens, les révolutions, le surgissement d’États nouveaux, comme l’Italie unifiée sous la direction de la maison de Savoie ou l’Allemagne de Bismarck, conduisent à la « production de masse des traditions ». Les symboles, effigies, drapeaux, hymnes nationaux, les commémorations – la prise de la Bastille, le jour de l’Indépendance aux États-Unis – visent à inscrire le peuple dans une histoire qui légitime les institutions en place et assure la cohésion sociale.
Il y a, pourrait-on dire, un « besoin d’histoire ». Le mouvement ouvrier qui se développe à partir de la moitié du xixe siècle invente, lui aussi, ses traditions : le 1er mai, le drapeau rouge, etc. Les nations en formation, par exemple celles qui se libèrent ou cherchent à se libérer de la colonisation ou d’une domination étrangère, se cherchent une histoire en rattachant à leur présent un passé dont on pourrait discuter la légitimité du point de vue d’une histoire objective, puisque précisément cette histoire concerne des nations qui n’existaient pas encore. Il ne s’agit pas à proprement parler d’invention, mais d’une appropriation nationale de l’histoire, un peu à la manière dont les Gaulois ont été transformés en ancêtres de la France au point de lui fournir un de ses symboles.
Là encore, on tentera de distinguer cette histoire construite, qui s’incruste dans la conscience collective d’une nation ou d’une classe, de l’histoire objective narrée par les historiens guidés par le souci d’objectivité et vérité. Pourtant cette distinction n’est pas si simple à établir. Hérodote voulait que les exploits tant des Grecs que des Barbares ne soient pas perdus. Pourtant, il ajoutait, concernant les responsabilités des uns et autres quant au déclenchement du conflit entre les Perses et les Grecs :
Quant à moi, là-dessus, je ne vais me prononcer ni pour ni contre. Mais je sais bien moi-même quel fut l’agresseur des Grecs et je le dirai.14
Son histoire est donc située clairement. Elle prend place dans une culture et une tradition à un moment donné. Et pourtant elle reste comme un des grands textes qui longtemps ont donné le modèle de ce que devait être le travail de l’historien impartial. Plus près de nous, les élèves des écoles ont d’abord appris l’histoire nationale et l’histoire du monde n’était vue, finalement, que relativement à cette histoire nationale. Les manuels d’Albert Malet et Jules Isaac (1877-1963) qui ont formé des générations de jeunes gens exaltaient la nation française et sa grandeur et pourtant n’étaient pas des livres de propagande : la vérité historique y trouvait son compte et les défaites ou les fautes des chefs n’étaient pas masquées. Si aujourd’hui, on cherche à enseigner d’abord une histoire plus globale, moins centrée sur la nation, si on prépare, par exemple, un manuel commun franco-allemand, ce n’est nullement un hasard ni le pur produit d’un progrès de l’objectivité historique. C’est tout simplement que la situation politique en Europe et dans le monde n’a plus grand-chose à voir avec ce qu’elle était dans la première moitié du xxe siècle et que l’on espère que l’éducation par l’enseignement de l’histoire contribuera à former une nouvelle conscience européenne. L’histoire est toujours une expression de « l’esprit du temps », pour reprendre encore une formule de Hegel, qui fait remarquer que « ce que l’historien présente comme l’esprit d’une époque risque d’être son propre esprit érigé en maître. »15
L’histoire comme genre littéraire
Ainsi l’histoire, sous toutes ses formes, est d’abord récit. Un récit plus ou moins véridique, un récit formalisé selon les canons de l’ouvrage d’histoire au premier chef, mais aussi le récit du guide pour des touristes visitant un monument, un récit que chacun peut se raconter quand il se promène dans des lieux familiers, un récit familial quand les parents ou les grands-parents racontent leur propre histoire et leur participation éventuelle aux évènements qui ont marqué l’histoire du pays. L’histoire se livre par des témoignages dont l’historien devra reconstituer la trame d’ensemble pour produire une narration.
Significativement, Paul Ricœur (1913-2006) fait découler récit historique et récit de fiction de la même matrice. Il s’agit pour lui « d’affirmer l’identité structurale entre l’historiographie et le récit de fiction »16. Ricœur prend ici le mot « historiographie » dans son sens le plus strict, « écriture de l’histoire » en général.
Temps humain et narration
L’objet propre de l’histoire est le temps humain. L’histoire, au sens strict, vise à la connaissance de ce qui n’existe plus. Certes, on peut définir une scientificité de l’histoire (voir chapitre v) mais cette scientificité est fondamentalement différente de celle qui concerne des objets existants, qu’il s’agisse des sciences du monde physique ou des sciences humaines. C’est cette spécificité qui explique qu’entre le récit historique et le récit de fiction les différences formelles apparaissent finalement très minces. L’historien Tite-Live et le poète Corneille (1606-1684) racontent la même histoire des Horaces et des Curiaces. Tout se passe un peu comme si Tite-Live avait écrit le scénario dont Corneille écrit les dialogues ! Entre la pure fiction et l’histoire, il n’existe pas de distinction toujours bien nette. De nombreux romanciers, hommes de théâtre, cinéastes ont fait de l’histoire la matière même de leur œuvre. C’est particulièrement net chez Shakespeare (1564-1616) dans la littérature romantique du xixe siècle (Hugo, Dumas). Et cette similitude ne doit rien au hasard.
Pour comprendre cette proximité, on peut faire un retour à Aristote. On dit couramment qu’Aristote définit l’art comme « imitation » (mimesis) et on en déduit une règle de l’art qui est l’imitation de la nature : par exemple, le peintre doit, tel Zeuxis peindre des raisins si ressemblants que les oiseaux viennent les picorer ! Mais cette manière de comprendre Aristote induit en erreur : l’artiste n’aurait finalement qu’à reproduire la nature et, évidemment, la copie serait toujours moins bonne que l’original. Il est sans doute préférable de suivre les traducteurs modernes qui rendent le sens de mimesis par « représentation ».17 Cela permet de mieux comprendre ce qu’Aristote veut dire quand, dans la Poétique, il affirme que l’art poétique est aussi mimesis : toutes les espèces d’œuvres poétiques, tragédie, comédie, poésie dithyrambique, etc., sont des « imitations » ou des représentations qui doivent constituer des « fables » (muthos) ou, comme Ricœur le traduit, des intrigues. Le poète, dans l’intrigue, représente des actions. Aristote essaie de fixer les règles de l’art de la représentation, mais au fond tout récit procède de cette manière : « mise en intrigue » qui aboutit à une représentation des actions. C’est pourquoi, après avoir défini les diverses genres qui ressortissent à l’art poétique, Aristote en vient à poser la question de la différence entre le poète et l’historien.
I. Il est évident, d’après ce qui précède, que l’affaire du poète, ce n’est pas de parler de ce qui est arrivé, mais bien de ce qui aurait pu arriver et des choses possibles, selon la vraisemblance ou la nécessité.
En effet, la différence entre l’historien et le poète ne consiste pas en ce que l’un écrit en vers, et l’autre en prose. Quand l’ouvrage d’Hérodote serait écrit en vers, ce n’en serait pas moins une histoire, indépendamment de la question de vers ou de prose. Cette différence consiste en ce que l’un parle de ce qui est arrivé, et l’autre de ce qui aurait pu arriver.18
Cette différence, très importante, évidemment, souligne en même temps la proximité de l’historien et du poète tragique ou comique et, pourrait-on dire, l’unité structurelle de leurs productions (poiêsis en grec renvoie à la fabrication productrice d’un objet). Dans les deux cas, il s’agit de représenter des actions, soit réelles (dans le cas de l’historien) soit simplement possibles (dans le cas du poète) et les représenter selon certaines règles de cohérence, selon des liens qui définissent précisément l’ensemble de ces actions comme une intrigue, une unité qui a un début, un milieu et une fin, ainsi que le dit encore Aristote.
Il faut donc déterminer ce qu’est cet objet particulier, les actions, qu’il s’agit de représenter. Il faut tout d’abord distinguer action et simple mouvement physique comme deux domaines différents. On ne parlera pas d’action pour les mouvements des choses de la nature. En général, on rapporte l’action à des sujets humains (ou à des sujets assimilés à des humains, comme les animaux dans les fables). On dit généralement que l’action se définit par des buts que le sujet anticipe la réalisation. Une action a également des motifs qui peuvent servir d’explication causale aux actions. Enfin les actions doivent pouvoir se rapporter au sujet comme ses actions ; le sujet est alors un agent responsable de ses actions. La question se complique cependant : pour parler d’action, il faut être capable de saisir tout ce qui est pertinent du point de vue de l’action. Par exemple, la respiration du héros ne fait pas partie de ses actions ; mais cette respiration s’accélère en raison de la peur ou de l’émotion, cet élément qui au sens strict n’est pas une action lui est cependant liée. Parler de l’action, c’est donc être capable non pas seulement de définir un concept de l’action, mais comme le dit Ricœur, de saisir un « réseau conceptuel ».
S’il y a action, il y a également passion. Si un sujet agit sur un autre, l’autre en pâtit. Mais, comme le fait encore remarquer Ricœur, le récit n’est pas simplement une suite de phrases d’action, « il y ajoute des traits discursifs » qui sont précisément ceux qui permettent de produire un discours proprement narratif. Quand on raconte une histoire, toutes les actions sont liées entre elles par des liens qui représentent l’ordre temporel. Ainsi que le dit Ricœur, « l’ordre syntagmatique du discours implique le caractère irréductiblement diachronique de toute histoire racontée. »19
Il y a donc bien une structure commune au récit de fiction et au récit historique, celle de la narration qui permet de produire une représentation du temps, c’est-à-dire de rendre présente à l’esprit la dimension historique de l’esprit humain.
Œuvres littéraires et œuvres historiques
Si on veut bien admettre avec Aristote que la poésie est imitation ou représentation, toute poésie n’est pas narrative, c’est-à-dire que toute poésie ne représente pas des actions. La poésie peut représenter les sentiments humains, des images, etc. Mais la poésie épique, la comédie et la tragédie appartiennent bien à ce genre narratif, tout comme cette invention beaucoup plus tardive qu’est le roman. Elles racontent une histoire et peuvent fusionner avec le récit historique lui-même. L’histoire peut servir d’arrière-plan à un récit de fiction – en fait, la plupart des fictions doivent plus ou moins être situées historiquement. Les descriptions, les conditions de l’action suffisent à définir cet arrière-plan. Mais loin d’être un décor, l’histoire peut occuper une place bien plus grande au point d’être le véritable sujet de l’action fictive : la fiction sert à mettre en scène une certaine représentation de l’histoire, par exemple dans Quatre vingt treize de Victor Hugo.
L’indistinction relative entre histoire et récit littéraire est particulièrement remarquable dans les mémoires qui entremêlent les souvenirs de l’auteur et les souvenirs des évènements historiques. On peut citer ici l’immense valeur historique que présentent les récits de Primo Levi (Si c’est un homme) ou de Robert Anthelme (L’espèce humaine) quant à la connaissance de la réalité des camps d’extermination. La biographie, elle aussi, est tout à la fois un genre littéraire et une œuvre d’histoire.
Une œuvre d’histoire peut aussi avoir une valeur littéraire propre : le style, la manière dont la vie des personnages est rendue ou la précision des descriptions, le souffle qui est donné à l’action, ce sont autant d’éléments qui concourent à distinguer les grands historiens du simple historien académique. Pensons ici à l’œuvre de Michelet qui appartient peut-être autant à la littérature romantique qu’à l’histoire.
Cette proximité de la littérature et de l’histoire ne va pas sans poser de nombreux problèmes. On peut confondre une biographie proprement historique et une biographie romancée. Les débats français du xviie siècle posent également ce problème : si l’auteur dramatique doit obéir aux règles de la tragédie classique, il doit mettre en scène une intrigue conforme à la vérité historique. La question ensuite est de savoir jusqu’à quel point il peut s’écarter de la vérité historique pour rester conforme aux exigences de l’art dramatique.
Or cette question n’est pas limitée à l’œuvre littéraire qui se veut véridique historiquement ; elle est posée également à l’historien confronté à la nécessité de la mise en récit de l’histoire.
L’autobiographie pose aussi de redoutables problèmes à l’historien. On peut la considérer comme un simple témoignage. Les Mémoires d’Outre-tombe constitueraient ainsi un témoignage parmi d’autres de la période révolutionnaire et post-révolutionnaire en France, une pièce à verser au dossier. Mais quand l’écrivain est un véritable artiste, il ne se contente pas de raconter. Chateaubriand ne tient pas une chronique : il met son époque en perspective. Il porte une appréciation subjective, mais cette appréciation subjective a elle-même une grande valeur pour l’historien. La biographie de Chateaubriand s’imbrique étroitement à l’histoire. Ainsi il écrit : « Parmi les pièces authentiques qui me servent de guide, je trouve les actes de décès de mes parents. Ces actes marquant aussi d'une façon particulière le décès du siècle, je les consigne ici comme une page d'histoire. » (Livre IV, chap. 5) Et quand il parle de cette « classe jalouse » appelée « bourgeoisie », il en dit long sur les rapports qui existent entre les deux fractions de la classe dominante après la révolution, et pourquoi quelques-uns des analystes les plus pénétrants de la nouvelle société qui se met en place viendront des rangs des écrivains monarchistes – Chateaubriand est en bonne compagnie : avec lui le jeune Hugo et Honoré de Balzac. Au-delà du témoignage, c’est le regard de l’artiste qui est précieux pour l’historien.
Conclusion
L’histoire nous apparaît donc inséparable de la constitution de toute cette mémoire collective qui fait en quelque sorte le ciment des sociétés humaines. Or cette mémoire collective, qui inscrit l’homme dans le temps, s’exprime par des récits. Cette première approche, cependant, ne fait que nous amener vers notre sujet. Si l’homme est un être historique, ce n’est pas seulement parce qu’il vit dans l’ombre du passé, c’est aussi qu’il est tourné vers l’avenir. L’histoire est indissociablement liée à l’action au présent et à une action qui n’est telle que parce qu’elle est orientée vers le futur.
1 Hérodote, Histoires, Livre I, Prologue
2 E. Kant : Histoire générale de la nature et théorie du ciel, in Œuvres I, Gallimard, collection « La Pléiade », p.37
3 S. Freud : Le malaise dans la culture, PUF, collection « Quadrige », 1995, p. 39
4 Dieu abstrait puisque l’homme ne peut même pas s’en faire de représentation. Dieu est un « père caché », invisible et innommable.
5 Voir C. Castoriadis, L’institution imaginaire de la société, Seuil, 1975
6 Nietzsche, De l’utilité et des inconvénients de l’histoire pour la vie, in Considérations inactuelles I et II, Gallimard, collection « Folio », pp. 95-96
7 L’Épopée de Gilgamesh est un récit légendaire de l'ancienne Mésopotamie, sans doue rédigé aux XVIIIe et XVIIe siècles A.C. en akkadien, à partir de récits légendaires sumériens ayant pour personnage principal le roi Gilgamesh d'Uruk. On y retrouve des mythes communs aux civilisations du Proche-Orient, comme le Déluge.
8 Voir Israël Finkelstein et Neil Asher Silberman, La Bible dévoilée, 2001, Bayard Éditions 2002 pour la traduction française.
9 Voir Claude Nicolet : La fabrique d’une nation. La France entre Rome et les Germains, Perrin, 2003
10 E ; Kantorowicz, Frédéric II, in Œuvres, Gallimard, collection « Quarto », p.565
11 Op. cit. p. 1234
12 E. Hobsbawm et T. Ranger : L’invention de la tradition, 1983, éditions Amsterdam, 2006 pour l’édition française.
13 Op. cit. pp. 11-12
14 Hérodote, Histoires, Livre I, Préface
15 Hegel : La raison dans l’histoire, UGE 10/18, p.30
16 P. Ricœur : Temps et Récit, 1.L’intrigue et le récit historique, Seuil, 1983, réédition « Points », p. 17
17 Il faut distinguer imitation et ressemblance. L’image imite mais sans forcément ressembler, si on prend image dans un sens assez large qui l’apparente au signe. Ainsi, dans la communion chrétienne, le pain et le vin sont l’image du Christ mais ne lui ressemblent pas.
18 Aristote, Poétique, 1541b
19 P. Ricœur, Temps et récit, 1, p. 112
Articles portant sur des thèmes similaires :
- Faut-il enterrer l'État-nation? - 09/02/17
- L'État totalitaire est-il encore un État? - 09/06/16
- Comment résister ? - 28/04/15
- Hannah Arendt, le totalitarisme et la banalité du mal - 12/04/12
- De la désobéissance - 16/10/13
- Commentaire du Traité Politique de Spinoza (III) - 30/05/13
- Lecture de "Vers la paix perpétuelle" de Kant (2) - 06/10/11
- Leçons sur l'histoire (III) - 21/10/09
- Mondialisation et nation - 26/03/05
- L'humanité comme fin en soi - 01/01/03
Ecrit par dcollin le Dimanche 11 Octobre 2009, 14:06 dans "Enseigner la philosophie" Lu 10392 fois.
Article précédent -
Article suivant