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La revendication d'homoparentalité et le malaise dans la culture

Réflexion à partir d'un cas récent

Depuis de nombreuses années maintenant le débat sur l’homoparentalité fait régulièrement retour sur la scène publique. C’est l’une de ces questions « sociétales » que l'on considère comme décisives pour mieux éviter de poser la question sociale, une question plus gênante pour le consensus libériste entre la droite et la gauche – je distingue le libérisme qui soutient que l’économie de marché résout toutes les questions sociales du politique dont il existe plusieurs versions honorables. La conclusion d’un récent procès qui a donné le droit d’adopter à une institutrice homosexuelle relance le débat. Dans la plus grande confusion puisque se chevauchent deux questions qui ne sont pas nécessairement liées : la question du droit des homosexuels à adopter et la question de l’homoparentalité. De même qu’un(e) célibataire peut adopter, il semble de bon sens qu’on autorise l’adoption par un(e) homosexuel(le). Le tribunal de Besançon dans l’affaire que nous venons de citer s’est d’ailleurs contenté de rappeler ce principe et rien d’autre. La question de l’homoparentalité est une tout autre affaire puisqu’elle vise à faire reconnaître le fait absurde qu’un enfant pourrait avoir une femme comme mère et une autre comme « père » ou que dans un couple masculin l’un des deux hommes jouerait le rôle de « mère ».

Dans Libération en date du 12/11/2009, on peut lire ceci :

Quelles compétences particulières possède donc le conseil général du Jura pour décider si une institutrice, vivant avec sa compagne, peut adopter ou non un enfant ? Cette seule question permet de mesurer l’absurdité du chemin de croix qu’ont dû emprunter durant onze ans Emmanuelle B. et Laurence R. pour faire valoir leur envie de parentalité. La décision du tribunal de Besançon marque au moins une victoire : celle du droit. En France, aucun texte ne s’oppose à l’adoption par une personne homosexuelle. Et les élus du Jura ou d’ailleurs ne devraient pas avoir leur mot à dire. Mais l’arrêt administratif pris mardi ne peut masquer l’immense retard français. Jusque-là, les couples préféraient cacher leur orientation sexuelle pour ne pas risquer de voir leur dossier écarté. On peut espérer désormais que les mentalités évoluent. Mais comment justifier qu’un(e) homosexuel(le) - à l’instar des hétérosexuels non mariés - soit contraint(e) de faire la démarche en célibataire et non en couple ? En janvier 2008, la France a été condamnée pour discrimination sexuelle par la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire d’Emmanuelle et de Laurence. Autour de nous, l’Espagne, la Grande Bretagne, mais aussi la Belgique ou le Danemark, ont fait évoluer leur législation. Quoi qu’en dise Nadine Morano, il est urgent que nous changions la loi interdisant l’adoption par les couples homosexuels dans l’Hexagone, dans le cadre d’un vaste débat plus que nécessaire sur l’homoparentalité.

Cet article est un concentré d’idéologie dominante, dominante à gauche, dans la classe médiatique et même dans une partie de la droite dont les porte-parole restent cependant prudents sur ces affaires pour des questions d’opportunité purement électorale. L’auteur de l’article commence par protester contre le fait que c’est un organisme dépendant du Conseil Général, au niveau de la DASS qui doit donner son agrément pour toute adoption. Car évidemment les adoptions ne sont pas votées en délibération du Conseil Général, mais le Président du CG contrôle une organisme qu’il a sous son autorité. Le tribunal administratif de Besançon a cassé la décision prise au niveau du CG et c’est maintenant au Tribunal d’Instance de prononcer le cas échéant l’adoption. Et donc toute la procédure suivie est conforme au droit – qu’une décision administrative puisse être cassée par un tribunal administratif, cela montre que le droit fonctionne encore et on devrait plutôt s’en féliciter. Que le journaliste parle de « chemin de croix » quand il s’agit de la simple application du droit semble assez curieux. Encore un peu et ce monsieur allait accuser les services sociaux de « crime contre l’humanité »! Soit dit en passant, si on peut accuser les services sociaux chargés de l’enfance de quelque chose, ce n’est certainement d’une trop grande sévérité mais bien plutôt d’un trop grand laxisme. Mais ceci est une autre affaire …

Nous arrivons au fond du problème: « l’immense retard français ». C’est la chanson commune droite-gauche chantée depuis des décennies, la chanson du « retard français » et des abominables « exceptions françaises ». En quoi consiste ce « retard français » ? C’est très simple : la France n’autorise pas l’adoption par des couples homosexuels et ce serait la une « discrimination sexuelle », qui s’opposerait à « l’envie de parentalité » d’Emmanuelle et Laurence.

On le sait : depuis que l’on a renoncé à l’égalité (une valeur extrêmement ringarde dans le monde « libéral » où la concurrence doit jouer à tous les étages, où tous les humains sont des rivaux pour la richesse et le pouvoir), la lutte contre les discriminations, remplaçant la lutte contre les inégalités, est devenue le credo des dominants, à commencer par l’actuel président de la République.

Commençons par le commencement : y a-t-il dans la loi française des discriminations contre les homosexuels ? La réponse est « non » et ce depuis la loi du 4 août 1982 où ont été abrogées toutes les dispositions introduites par Pétain en 1942 et conservées depuis. Remarquons que la révolution française avait déjà dépénalisé l’homosexualité comme elle a dépénalisé l’inceste (entre adultes consentants) ! Les révolutionnaires de 1789 et 1793 considéraient que la sexualité est une affaire intime et que l’État n’a rien à faire dans les lits des amants, quelles que soient leurs « orientations sexuelles » comme on dit aujourd’hui. Le terme d’inceste est d’ailleurs absent du code pénal. Il constitue seulement une circonstance aggravante en cas d’agression sexuelle, de corruption de mineur, etc. Mais bien évidemment, la loi a continué d’interdire les mariages entre frères et sœurs ou ascendants et descendants. C’est M. Estrosi qui récemment (2004) a voulu faire de l’inceste une infraction particulière. En tout cas, le principe, le seul principe qui juridiquement vaille est celui du droit à l’intimité. On peut faire l’amour à un, deux ou un nombre indéterminé de participants, tant que l’ordre public n’est pas troublé et tant que ne sont impliquées que des personnes majeures et consentantes d’un consentement éclairé, l’État doit s’abstenir de légiférer. Et aujourd’hui il n’y a aucune loi réprimant d’une manière ou d’une autre les relations sexuelles entre personnes du même sexe. Et c’est heureux. Et si les manifestations d’hostilité à l’égard des homosexuels dans la vie civile demeurent, elles ne sont pas plus importantes, et même plutôt moins, que les manifestations de racisme ou toutes les autres formes de mépris à l’endroit de telle ou telle catégorie – les pauvres, les vieux, les gros, etc. Il est plus facile de trouver du travail ou un appartement en étant homosexuel qu’en se prénommant Mohammed.

On pourrait plutôt s’étonner que les orientations sexuelles deviennent des motifs d’exhibition publique. Ainsi la « gay pride », l’endroit du dernier chic où tout le « beau monde » qui compte doit se faire voir, est-elle une des manifestations de l’obscénité générale de nos sociétés. Il n’est pas honteux d’avoir des attirances sexuelles pour les personnes de son sexe – depuis Freud, tout le monde sait cela – mais il n’y a pas non plus de raison d’en être fier ! Il est vrai qu’existe maintenant un « marathon international de la masturbation » et que l'on devrait sur cette lancée, pendant qu’on y est, créer des JO de la partouze par équipes nationales. Les « soupçonneux », ceux dont les mentalités sont encore prisonnières du « retard français » feront remarquer que cet exhibitionnisme général a partie liée avec le business. Il y a, c’est bien connu, un « gay business » mais surtout, toutes catégories confondues, le business du sexe, au niveau international, dépasserait selon certaines estimations les 1000 milliards de dollars, soit plus que l’industrie pharmaceutique … ou l’armement. Sur ces questions, je renvoie au livre de Dany-Robert Dufour, La cité obscène, et pornographie, Denoël, 2009.

Mais, dira-t-on, les homosexuels sont victimes de pratiques discriminatoires devant le mariage. D’abord, j’ai beaucoup de mal à comprendre pourquoi les homosexuels veulent que leurs « orientations sexuelles » reçoivent, si j’ose dire, la bénédiction de l’État par l’intermédiaire du mariage, alors que pendant un siècle et plus, le refus de l’ordre social dominant s’identifiait souvent avec le refus du mariage, symbole de l’embourgeoisement. Il n’est pas si loin le temps où Brassens chantait pour son amante: « J’ai l’honneur de ne pas te demander ta main. Ne gravons pas nos noms au bas d’un parchemin. »

Il n’y a cependant aucune discrimination à l’encontre des homosexuels. Le mariage n’a pas pour fonction de légaliser des relations sexuelles, mais de définir l’ordre de la reproduction et de la transmission de la propriété. En définissant le père comme le mari, le code civil, dit code Napoléon, a bien montré qu’il se moquait de la sexualité et que son seul objet est de déterminer qui détient l’autorité familiale et comment les biens peuvent être transmis. Le mariage est institué pour donner un cadre légal à la procréation et donc c’est nécessairement un mariage entre deux personnes de sexe différent, car, à moins de taxer dame Nature d’homophobie et de pratiques discriminatoires, il reste encore de nos jours impossible qu’un homme tombe « enceint » des œuvres de son compagnon ou qu’un femme puisse accueillir en sa matrice la semence « virile » de sa compagne. La loi de reproduction sexuée est dure mais c’est la loi et pour faire un œuf humain, il faut un ovule et un spermatozoïde, une gamète femelle et un gamète mâle. Doit-on poursuivre les professeurs de sciences naturelles qui continuent d’enseigner cette science retardataire pour « propos homophobes »?

Sans doute le Code civil doit-il prévoir des aménagements particuliers pour les couples homosexuels, notamment ceux qui de longtemps font leur vie ensemble, achètent un appartement, etc., et le PACS a été un premier pas dans cette voie. Le PACS souffre peut-être d’insuffisances. On peut les corriger facilement en aménageant la loi. Mais rien de tout cela ne rend le mariage « hétérosexuel » discriminatoire. De même que l’interdiction de la polygamie n’est pas discriminatoire à l’encontre des polygames … Et pourtant, certaines religions, certaines coutumes nationales admettent et dans certains cas encouragent la polygamie. Les « Jules et Jim » qui aiment la même femme, les « ménages à trois » ne manquent pas et on se gardera bien de porter des jugements moralisateurs quand il s’agit d’affaires amoureuses. Mais personne ne demande la légalisation de la polygamie en France – alors même que la polygamie « de fait » est extrêmement répandue et pas seulement chez les musulmans d’Afrique subsaharienne !

Qu’on me comprenne bien : je ne suis pas dans l’absolu contre le mariage homosexuel. On pourrait décider que le mariage civil est un simple contrat entre deux individus indépendamment de leur sexe et ce serait tout à fait conforme à l’évolution ultra-libérale de nos sociétés, une évolution qui vise à contractualiser toutes les formes de relations sociales. Cette évolution, bien dans l’air du temps, marquerait une nouvelle étape symbolique vers la constitution d’une société d’individus, totalement indépendants, totalement séparés les uns des autres et liés uniquement par des agréments noués en fonction de la recherche par chacun de la maximisation de son utilité ou de son bien-être. Ce qui est très curieux, c’est que des gens (de « gauche ») qui se disent volontiers antilibéraux, sans même bien savoir ce qu’ils entendent par là, militent activement pour une évolution qui signe l’intrusion croissante et hors de toute mesure des valeurs de l’individualisme libéral dans nos sociétés. Mais, quoi qu’il en soit, si on devait autoriser le mariage homosexuel, ce ne serait pas en raison du caractère discriminatoire du mariage sous sa forme actuelle mais en vue d’adapter le droit à une nouvelle société – si on peut encore donner ce nom à ce qui se mijote dans les fourneaux du « capitalisme absolu ».

Pourquoi l’insistance sur le mariage homosexuel, alors ? Tout simplement pour faire reconnaître autre chose qu’une simple union où l’on partage le lit et le réfrigérateur, pour faire reconnaître l’homoparentalité. Là encore, c’est la prétendue discrimination qui est invoquée et là encore on peut facilement remarquer qu’il n’y a aucune discrimination car ce n’est pas loi mais la nature qui empêche les couples homosexuels d’être fertiles. Si les homosexuels veulent à tout prix des enfants, ils peuvent toujours employer la méthode classique et gratuite et se convertir à l’hétérosexualité, « une heure, douche comprise » comme le dit drôlement Élisabeth Levy sur le site « Le Causeur ». Pour réaliser nos buts et atteindre le bonheur, nous sommes fréquemment contraints à subir des épreuves nettement plus désagréables. On nous rétorquera que la bonne comparaison est à faire entre les couples homosexuels et les couples hétérosexuels infertiles. Ceux-ci ont le droit d’adopter – à condition d’être mariés, car les non-mariés, comme les homosexuels ne peuvent faire qu’une procédure d’adoption individuelle – et ceux-là en sont privés. La différence ici est tout symbolique mais les sociétés ne vivent qu’avec des symboles car les hommes ne sont pas des bêtes et la culture humaine c’est précisément cela, l’entrée dans l’ordre symbolique. Un couple hétérosexuel infertile reconnaît que la reproduction est affaire sexuelle. Le père adoptif est un homme et la mère adoptive une femme. Et du même coup, ce couple reconnaît que la société s’articule à la nature pour l’organiser et la discipliner. Inversement, un couple homosexuel exhibe le modèle absurdissime d’une reproduction non sexuée. L’enfant adopté par un couple hétérosexuel sait qu’il est né d’un homme et d’une femme. À l’enfant d’un couple homosexuel, on tente de faire accroire que l’homme et la femme sont la même chose, que les sexes sont indistincts et que la reproduction n’est qu’un pur artifice.

On l’aura remarqué : je ne fais nulle part intervenir les arguments utilitaristes concernant le bien de l’enfant. Un couple d’homosexuels aisés et aimants est sûrement un milieu plus intéressant pour l’enfant que des parents pauvres et alcooliques qui se balancent la vaisselle à la figure – j’ai volontairement repris ces stéréotypes éculés parce que ce sont eux qui se trouvent à l’arrière-plan des arguments utilitaristes si souvent repris par les défenseurs « upper middle class » de l’homoparentalité, des arguments qui sentent mauvais le mépris de classe. Ces arguments utilitaristes sont des arguments ultra-libéraux. C’est au nom du bien de l’enfant que certains économistes ont soutenu qu’il était moralement acceptable d’instaurer un marché de l’adoption. Bertrand Lemennicier, un « libériste » fanatique, professeur à Paris II Panthéon-A ssas, a soutenu dès 1988 la nécessaire déréglementation et la privatisation de l’adoption. Il reçoit donc aujourd’hui le soutien (implicite et inconscient) de tout ce que la gauche « libérale » et l’ultra-gauche sociétale compte de gens BCBG : le NPA et le Parti de Gauche se prononcent l’un et l’autre pour « le droit à l’homoparentalité » et même le PCF qui fait des efforts désespérés pour faire oublier sa bigoterie d’antan (de l'époque où Jeannette Vermersch régnait sur la moralité du parti ...) voit dans le jugement de Besançon un progrès vers la reconnaissance de l’homoparentalité.

Le sommet est atteint quand notre journaliste de Libération écrit que Laurence et Emmanuelle ont dû aller devant les tribunaux «  faire valoir leur envie de parentalité ». Depuis plusieurs années ont fleuri les expressions aussi baroques qu’insupportables: « projet parental », « droit à l’enfant » et maintenant c’est devant la justice qu’on fait valoir ses « envies » ! Qu’avoir un enfant soit un projet montre à quel point la rationalité technicienne entrepreneuriale a infesté toute vie humaine normale. Les enfants, normalement, ne sont pas un « projet » comme celui de construire une maison de faire une belle carrière ! Les enfants ne procèdent pas d’une démarche rationnelle par finalité, pour parler le langage de l’individualisme méthodologique. Mais dès lors que les enfants deviennent un « projet parental », la procréation doit obéir aux normes modernes et ainsi se développe progressivement la technicisation de la procréation. Bientôt l’enfant « zéro défaut », normalisé ISO ? On pourrait résumer le projet parental à « Docteur, faites nous ce qu’il y a de mieux », ainsi que Jacques Testart le disait ironiquement en dénonçant les dérives de l’assistance médicale à la procréation (AMP).

Si l’expression « projet parental » est insupportable, il n’en va guère mieux avec le « droit à l’enfant ». À qui va donc s’adresser une telle revendication ? Un homme pourra-t-il se plaindre et auprès de qui que son droit à l’enfant n’ait pas été honoré ? On peut réclamer un « droit à l’emploi » car une société bien organisée pourrait sans problème permettre à chaque individu de gagner honnêtement sa vie par son travail. Mais un « droit à l’enfant » ? Et pourquoi pas la multiplication de droits d’un tel genre ? Un tel va se plaindre de ne pas mesurer la taille suffisante pour avoir une chance de faire un champion de basket ? Y a-t-il discrimination quand tout le monde ne bénéficie pas de son droit à devenir une vedette, un chanteur de charme ou un prix Nobel de physique ? La médecine, comme toute technique, imite la nature et y supplée quand elle n’est pas assez puissante, ainsi que le disait Aristote. Mais ni la médecine ni la société ne peuvent nous garantir un « droit à l’enfant ».

En qu’enfin la justice soit chargée de faire droit à notre « envie de parentalité », cela dépasse toutes les limites de la bêtise. J’ai envie de devenir un virtuose du saxo comme Coltrane ; dois-je m’adresser à la justice et même s’il faut suivre un « chemin de croix » ? En vérité, dans toute cette affaire, c’est le phantasme infantile de toute-puissance qui s’affirme chez des individus qui, pourtant, ne sont plus des petits enfants depuis longtemps. C’est aussi la volonté d’éradiquer la nature sous toutes ses formes : la procréation sans sexe, la scotomisation du père ou de la mère (avec les mères porteuses), la transformation de la loi en pur arrangement conventionnel selon notre bon plaisir : nous avons là quelques-unes des figures de la post-modernité. Pourquoi ont-elles un succès public si massif ? Parce qu’elles entrent en résonance avec l’idéologie et les intérêts matériels des classes dominantes et en même temps avec les phantasmes que toutes les sociétés jusqu’à nos jours s’étaient évertuées à refouler ou à domestiquer et qui aujourd’hui commencent à acquérir « droit de cité » à l’époque de la désinhibition généralisée. Ainsi la chronique judiciaire devient-elle un puissant révélateur du « malaise dans la culture ».

Le 21 novembre 2009


 

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Ecrit par dcollin le Samedi 21 Novembre 2009, 16:07 dans "Actualités" Lu 8555 fois. Version imprimable

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Commentaires

quent1 - le 21-11-09 à 16:51 - #

Voici le JT du jour du 17 octobre non rouge en compagnie de Jacques Testart cité toilée, vivent la science, les artifices et ruses,  le modernisme et les savants fous, corps marchandise  « ..Ainsi, le cas des mères porteuses , déjà ramené à l’altruisme par sa nouvelle appellation(« gestation pour autrui »= GPA) est réduit à la seule dimension, certes intolérable, de l’instrumentalisation du corps féminin, en omettant les perturbations sociales induites par une offre rémunérée de grossesse (les hypocrites disent « indemnisation » mais les femmes de Neuilly porteront-elles les enfants du 9-3 ?) et les conséquences pour l’enfant à naître. Il en est de même avec l’anonymat du don de gamètes, l’argumentation nourrie depuis 30 ans par les prat..

 

élection des humains dés le stade embryonnaire, les débats se focalisent sur l’embryon lui-même, c’est à dire sur l’acte euthanasique (d….

menaces anthropologiques, celles qui visent l’humanité, au delà de son sperme, de son œuf ou de son utérus… »

Quand le doigt montre la lune La Décroissance, à paraître en décembre 2009


Re:

LEMOINE - le 21-11-09 à 18:13 - #

Ce que je trouve vraiment inquiétant dans ces questions « sociétales » c’est qu’aujourd’hui, elles ne peuvent tout simplement plus être discutées. La question est posée dans des termes tels (et que vous analysez très bien) qu’il faut faire un long travail de « mise au point » pour pouvoir avancer des arguments sérieux.
 
Tout cela s’accompagne d’un véritable « terrorisme intellectuel ». Il vaut mieux se taire, si on n’aime pas se faire insulter, quand cette question vient à être discutée en société.
 
J’ai même constaté lors d’une discussion de ce genre qu’il n’était même plus admis de rappeler les analyses de Freud contre la conception essentialiste de l’homosexualité : cette prétention qu’il dénonce à constituer un troisième sexe, son analyse de la diversité et la variabilité des formes de la sexualité, les fixations à des stades infantiles etc.
 
Enfin, je suis surpris des moyens dont dispose la presse « gay » alors que son public devrait être naturellement assez restreint. Je ne vois pas comment autant de magazines, des groupes de pression, de locaux peuvent être financés et. Je serais curieux de savoir qui fait quoi et pourquoi.


Quelle bêtise !

Claire - le 22-11-09 à 22:24 - #

Vous arrive-t-il de réaliser que 2 % de l'humanité est atteinte de sterilité irréversible ? Que la question des mères porteuses dépasse largement le territoire de la morale étriquée dont vous êtes le représentant ? Et quelles sont vos motivations pour tordre la réalité et vous lancer dans un combat douteux ? Non à la Morale Pour Autrui !


Re: Quelle bêtise ! et quelle inconscience morale!

dcollin - le 22-11-09 à 22:47 - #

Vous arrive-t-il de penser que nous allons mourir et que, quel scandale, la loi ne fait rien pour empêcher ça!
La référence aux mères porteuses est du reste très intéressante: pour satisfaire l'irrépressible désir d'enfant, on trouve normal de louer des ventres.
Je suppose que les mêmes personnes sont contre l'esclavage et toutes les discriminations ... Enfin je ne sais pas ce qui vous permet d'affirmer que je prèche une morale pour autrui. Que savez-vous de moi? Rien, évidemment. Mais votre réaction est typique: c'est la subjectivité qui doit s'exprimer. Et si je ne suis pas une mère en mal d'enfant, je n'ai rien à dire. Il n'existe plus aucune loi objective.  Moi, mes désirs ... Voilà la seule loi à laquelle nous devrions inconditionnellement obéir.

Il est tout de même nécessaire de préciser quelques points:

1) le nombre d'enfants adoptables en France est très bas et en tout cas incapable de satisfaire la demande. Donc pour l'essentiel les adoptions se font à partir de pays pauvres. Si, comme on peut l'espérer ces pays améliorent sérieusement leur niveau de vie, il n'y aura plus assez d'enfants à adopter pour satisfaire vos 2% d'humanité stérile. D'autant qu'avec la hausse du niveau de vie, la hausse de l'instruction des femmes, le nombre d'enfants chute. Voulez-vous donc maintenir de beaux ilôts de misère pour garantir l'approvisionnement régulier des riches en stocks d'enfants adoptables (je pense ici à une récette affaire au Tchad)?

2) les mères porteuses, qui est-ce?  Les femmes aisées qui font ça pour se passer le temps.  Non, comme toujours les pauvres qui trouvent là un utile complément de revenu. Il en est d'ailleurs de même des donneuses d'ovules qui sont recrutées dans les cliniques de certains pays européens du sud et de l'est.


Re: Quelle bêtise ! et quelle inconscience morale!

Claire - le 23-11-09 à 09:05 - #

Non à la Morale Pour Autrui balancée par des personnes qui ne veulent pas voir la réalité. Quelques exemples flagrants :

Quand la journaliste parle de chemin de croix, elle fait allusion à toute la procédure judqu'à la cour européenne qu'a du enduré cette femme pour faire valoir son droit.  Soit 10 années que vous semblez oublier.

Pour l'adoption, ai-je dit quelque chose qui laisse penser à une demande de changement du nombre d'enfants adoptables ? Ou même encore que le rôle de l'adoption était de répondre aux couples qui ne peuvent avoir d'enfants ? Non. Alors cessez d'imaginer ce que je pense.

Ensuite, le coup des mères porteuses pauvres et exploitées, c'est vraiment du n'importe quoi pour habiller votre refus de la gestation pour autrui. Cet article fort documenté montre une autre réalité :

http://www.liberation.fr/vous/0101603160-meres-porteuses-en-toutes-legalites 

De plus, les résultats de la plus grande étude menée sur les gestatrices révèle le contraire de ce que vous affirmez :
l’étude de Betsy Aigen montre que 71 % d’entre elles ont en réalité un travail, qu’elles sont très majoritairement blanches, catholiques ou protestantes, et que leur revenu professionnel est en moyenne de 24 000 US $. (Motivations of surrogate mothers : parenthood, altruism and self-actualization, a three year study (Dr Betsy P. Aigen, 20 septembre 2006, http://claradoc.gpa.free.fr/doc/87.pdf ).

Non à la Morale Pour Autrui qui consiste à critiquer les choix des autres en disant que ce sont d'horribles égoistes immatures qui profitent de femmes pauvres qui ne savent pas ce qu'elles font bien sûr puisqu'on peut se permettre de les insulter en les traitant de simples ventres.


Re: Quelle bêtise ! et quelle inconscience morale!

LEMOINE - le 23-11-09 à 10:24 - #

C’est typique : vous parlez d’idéologie, on vous répond morale. Vous parlez du discours sur l’homoparentalité comme « concentré d’idéologie dominante », on vous répond par le problème des couples stériles.
 
Brouiller le discours, déplacer du plan politique au moral. C’est là d’excelle l’idéologie dominante. Vous pouvez bien dire qu’elle s’appuie sur des contre vérités (exemple : le mariage n’a pas pour objet de légaliser les rapports sexuels), des occultations,  des glissements (le passage de la question de l’égalité à celle de la discrimination). Vous perdez votre temps.
 
Le problème c’est que nous sommes envahi par cette idéologie. Elle joue sur cette grande peur de notre temps, inculquée à l’adolescence et entretenue par le cinéma, la publicité, la littérature etc : avoir l’air ringard, être coincé du cul !
 
C’est tout sauf çà ! Les publicitaires l’ont bien compris et ils en jouent.
 
Tiens, je voyais hier une publicité à la télévision : une mère et sa fille (très BCBG) sont dans leur voiture (une voiture bien comme il faut). Elles stationnent devant une affiche. On voit que la fille se produit dans un spectacle de nu. La fille est un peu gênée. « Tu ne m’avais pas dit que tu avais trouvé du travail » dit la mère. Et la voix off conclu : « bien dans sa Twingo, bien dans sa vie ».
 
Peu importe qu’il s’agisse d’une Twingo ou d’une autre voiture. Je ne l’ai pas retenu. La mère n’est pas coincée du cul, c’est l’essentiel et nous sommes invités à être comme elle, donc à avoir cette voiture.
Peu importe combien consomme la voiture, où elle est fabriquée, à quels coûts salariaux etc. Il faudrait être « coincé du cul » pour ramener de pareils problèmes.
Peu importe qu’une demoiselle, qui se produit dans un spectacle de nu, gâche ses études et que, quand elle aura pris de l’âge, ses diplômes ne voudront plus rien. Elle aura un avenir d’intermittent du spectacle. Mais on s’en fout !
 
Regardez Sarkozy. Est-ce qu’il est coincé lui ? Non et il le fait savoir : dîner au Fouquet’s, croisière pour remercier ses financiers français, voyage aux Etats-Unis pour remercier ses bailleurs de fonds américains. Chaque jour et à chaque discours, il le fait savoir.
 
Et vous seriez assez « coincé du cul » pour poser la question ringarde de la démocratie. La démocratie c’est quand on vote. C’est tout.


Deux remarques de logique et un rappel

Jean-Marie Nicolle - le 28-11-09 à 15:25 - #

Peut-être suis-je intellectuellement borné, mais je ne comprends pas la logique de la revendication à l'homoparentalité. 
D'un côté, les homosexuel(le)s veulent que leur différence soit reconnue, admise et protégée par des lois. Très bien. Mais, par ailleurs, ils et elles réclament d'avoir les "mêmes" droits que tout le monde. Si je revendique une différence, ne dois-je pas l'affirmer, au contraire, et en assumer toutes les conséquences ?
La revendication du droit "à" l'enfant est encore une revendication d'un droit de propriété. On n'a guère progressé depuis la théorie d'Aristote qui faisait du maître le propriétaire de sa progéniture. Pourquoi ne présente-t-on pas cette demande comme celle du droit "de" l'enfant à avoir des parents ?
Je rappelle que Freud considérait l'homosexualité comme une perversion ! Non pas au sens des vieux moralistes qui condamnent tout ce qui sort de la norme, mais au sens où cette forme de libido est investie dans la transgression de la loi. Du refus de soumettre son désir à la loi, on passe à l'exigence de soumettre la loi à son désir. On est en pleine inversion.


Re: Deux remarques de logique et un rappel... Pff ! Aucune logique dans vos propos !

Claire - le 02-12-09 à 14:32 - #

Aucun couple infertile, aucune association qui les représente n’évoque cet étrange concept de droit à l’enfant que vous agitez.
 
Les couples infertiles invoquent le droit à fonder une famille (article 16 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme) et le droit à bénéficier équitablement de soins et de la protection de la santé (préambule de la Constitution française, article 11 de la Charte Sociale Européenne, Convention internationale de l’OMS…).
 
L’infertilité est reconnue comme une maladie par l’OMS.
 
Il y a de l’AMP dans tous les pays, y compris dans ceux où le taux de natalité est élevé et où l’adoption est ouverte. L’OMS finance un programme de FIV à bas coût pour en faciliter l’accès dans les pays en développement.
 
Aucun pays au monde ne fournit des enfants sur demande. Un long parcours pour les couples infertiles est nécessaire mais pas suffisant. Dans le meilleur des cas, même sans limiter le nombre de FIV, la probabilité d’être un jour parents ne dépasse pas 80 %. Dans l’adoption en France, elle ne dépasse pas 6%. Le droit à l’enfant n’a donc aucune réalité.
 
Dans les débats, la notion du droit à l’enfant est exclusivement avancée par des personnes qui condamnent la GPA, voire l’AMP.
 
Le droit à l’enfant est de fait invoqué pour interdire d’enfant une catégorie de personnes (les couples qui ne peuvent porter un enfant, voire tous les couples infertiles).
 
Interdire d’enfants une catégorie de la population au nom de l’intérêt de la société et de l’enfant à ne pas naître, cela rappelle l’objet de politiques condamnables menées en Amérique du Nord ou en Scandinavie il n’y a pas si longtemps. Cela porte un nom : l'eugénisme.

PS : je me fiche des états d'âme de certains sur une pub de voiture !


Re: Deux remarques de logique et un rappel... Pff ! Aucune logique dans vos propos !

quent1 - le 02-12-09 à 22:07 - #

Elle est pas claire Claire, serait-elle sectaire en ne souhaitant pas répondre clairement aux arguments et en avançant masquée par une avalanche de bizarres références pour qualifier ce débat là et attaquer ceux et celles qui tentent de réfléchir et de percevoir vers où l'on se dirige ? signé une épistolière postière-communiquante PTT FT qui a connu plusieurs collègues adoptants et qui sait par où ils et elles sont passés...


Un débat ? Où ça ?

Claire - le 03-12-09 à 12:13 - #

Chère postière,

Je ne sais où vous avez trouvé un débat. J'ai démonté quelques contre-vérités factuelles bien fâcheuses et il m'a été répondu des digressions pittoresques sur la publicité automobile et autres. Bref, je ne pense pas que le manque de débat soit à mettre sur mon dos. Sectaire, ça reste un net progrès par rapport aux nombrilisme de certains commentaires, vous ne trouvez pas ?


Re: Quelle bêtise ! et quelle inconscience morale!

Laurent - le 14-01-10 à 19:54 - #

Bravo Denis COLLIN !

Il faut beaucoup de courage de nos jours, où la bêtise télévisuelle remplace la réflexion dans les têtes molles, pour analyser et répondre à ces grandes orgues de propagande de fausse tolérance aptes a transformer les nunuches sans réflexion en commissaires politiques du bien pensant socialo-libéral !

Et vous le fait avec beaucoup de talent !

Toute mon amitié fraternelle

Laurent


Re: Quelle bêtise ! et quelle inconscience morale!

dcollin - le 15-01-10 à 08:27 - #

Merci pour ces encouragements. Ce qui est frappant, c'est de voir combien le "libertarisme" du genre "mes désirs, mon droit" camoufle à peine un puritanisme et une volonté de contrôle des consciences assez terrifiants.
DC


homoparentalité

Gramling Jean-Noël - le 14-12-09 à 10:26 - #

  Globalement d'accord,sauf sur la critique du projet parental, cette notion me semble consubstantielle au mariage hétéro de par la longueur de l'engagement qu'elle induit.

         De plus dans l'homoparentalité, il y a la perpesctive inquiétante de la justification du clonage humain et du développement  séparé des sexes comme solution aux difficultés de relation entre les sexes, et ce par achèvement

 de l'érection de l'homosexualité comme norme sexuelle à l'égale de l'hétérosexualité.

  Un raisonnement analogue pourrait être tenu sur certains points concernant le thème de la régularisation de tous les sans papier


Parent(s)

Guerrier - le 22-12-09 à 18:54 - #

Il semble que le débat ouvre grand les champs des passions.
Ce ne sont peut-être pas les meilleures conseillères lorsqu'il s'agit de tenter de trouver un équilibre entre des forces contradictoires : le désir d'un groupe récemment "normalisé" en France et les usages et les lois.
Désir et loi sont souvent incompatibles.
La question qui se pose doit se poser différemment qu'il s'agisse des mères porteuses, des adoptions dans les couples hétérosexuels et des adoptions dans les couples homosexuels,.
S'il nous faut y voir plus clair, c'est à dire plus sagement ne mélangeons pas ces cas complètement différents dans leur genèse.
L'homoparentalité n'est pas à questionner en terme de capacité éducative ou de capacité de soins bienveillants, elle est à questionner
" à l'envers".
Elle fait oeuvre de déni d'un élément non palpable mais absolument actif, la question des origines.
Aucun humain ne peut vivre sans se la poser pour lui et pour ses descendants et il semble que nier l'impossible de l'origine en acceptant de réduire la parentalité à une fonction éducative et en oblitérant la nature absolument hétérosexuelle de sa possibilité nous égare.
Quelques soient les moyens de fécondation, l'enfant nait d'une rencontre entre deux sexes différents, c'est cela et seulement cela qui le fonde.
Dans sa chair bien sûr mais aussi dans ses limites identitaires.
Cela aussi qui le structure comme être sexué : la possibilité de s'identifier à la fois à chacun des partenaires, même putatifs, de sa création.
"D'où viens-je ?" est aussi fondamental qu' "avec qui fais-je le chemin ?" et dans de nombreux exemples d'adoption cette question vient choquer, bousculer l'édifice à un moment ou à un autre.
Il ne peut pas en être autrement quelque soit la qualité de l'éducation.
Elever un enfant n'est pas seulement un acte éducatif, c'est une façon de mettre une créature dans un lignage et il n'est pas de lignage pensable, mentalisable sans différence des sexes.
L'homosexualité est en partie un déni de cette inscription, encore une fois, le point de vue moral n'a aucune place dans cette observation.
La différence tant revendiquée passe aussi par un constat, la perte.
Celle de pouvoir avoir et être tout à la fois.


Re: Parent(s)

Pascale - le 29-01-10 à 22:29 - #

 J'efface le temps de ce message les notions d'homoparentalité, de droit à l'enfant, de lignage et d'identification pour poser un problème le plus simplement possible.
Mon fils est homosexuel et vit avec son compagnon.
Ils souhaitent tous deux adopter un enfant.
Cet enfant vivrait avec eux deux et serait donc élevé par eux deux.Si l'un d'eux seulement est adoptant (comme le prévoit actuellement la loi) et que l'un des deux disparaît, par séparation ou décès, il vaudrait mieux si l'enfant n'est adopté que par l'un, que ce soit l'autre qui meure ou s'en aille.Mais dans le cas contraire, que prévoit la loi? Que devient l'enfant "orphelin", ou abandonné?
C'est ce cas qui pose problème et pour lequel il serait bon de légiférer, ne pensez-vous pas?


Re: Parent(s)

Guerrier - le 30-01-10 à 09:51 - #

"L'enfant " est un mythe.
Il est d'abord un fantasme venant répondre, différemment pour chaque individu, à un désir.
Ce désir peut bien être qualifié de "désir d'enfant", il est seulement une réponse à un autre désir, tû ou, la plupart du temps, inconnu.
Et "l'enfant" désiré est là avant la réalité de l' enfant qui elle, nous échappera de toute façon.
Quelque soit le couple, l'individu dans ce couple, son genre, que cet individu ait ou non choisi la grossesse, l'enfant à venir, adopté ou non, vient d'abord répondre à une question posée à soi,  à soi dans son couple et dans son existence séparée mais sous une forme qui n'est pas toujours la bonne ni la mieux posée.
Il est possible que dans les cas d'homoparentalité comme ailleurs il vienne aussi incarner le scellement d'une union, lui garantir par tiers interposé sa longévité voire son éternité, n'est-ce-pas de notre propre éternité dont l'enfant né de nous se fait le garant ?
Mais l'enfant n'est pas un symbole comme par exemple un mariage pourrait l'être, il vient vivant pour lui-même, unique et définitivement présent là où il était attendu afin de  remplir un rôle pour d'autres.
L'enfant est une surface de projection à qui il donne du corps, puis avec laquelle il se "débrouille" au sens où chaque enfant démêlera plus ou moins bien mais toujours les fils de l'autre.
Bien-sûr, dans l'ingenuité d'un projet où ces fils de l'autre sont confondus, et pour son bien, avec les siens, la mort, la séparation envisageable brouillent l'horizon.
L'enfant et ce qu'il est deviennent toujours compliqués quand la réalité reprend ses droits en suivant simplement son cours.
Le "désir" d'enfant est touchant, toujours, il résonne aux fibres de notre quête de pureté, lavé par sa postulée innocence de toute ambiguïté mais le destin de l'enfant soi-disant "désiré" est tout autre.
Que lui veut-on ?
Que lui veut -on en ne montrant que ce qu'on veut lui donner ?
Que lui fait-on et que fait-on de lui ?
Légiférer nous garde des chutes trop brutales, pas plus.
N'est-ce-pas à nous de nous demander comment ne pas tomber ?
Et comment ne pas entrainer ceux qui n'ont été que les acteurs sur nos propres scènes avec nous dans la chute de nos désillusions ?




Re: Parent(s)

pascale - le 30-01-10 à 12:00 - #

Quelle terrible réponse!
Résignons-nous, mon frère, et surtout, noyons le poisson pour ne pas vraiment aborder un problème ô combien douloureusement concret.


Re: Parent(s)

dcollin - le 01-02-10 à 06:58 - #

Si l'on veut parler de "problème douloureusement concret", il faut revenir les pieds sur terre. Pour qu'on puisse l'adopter, il faut qu'un enfant ait été abandonné ou privé de parents par la mort. Ce simple fait devrait suffire pour éliminer l'idée absurdissime de "droit à l'enfant". Dans un monde idéal - il faut toujours commencer par raisonner à partir du monde idéal - l'enfant à adopter n'existerait pas. C'est précisément la raison pour laquelle on essaie aujourd'hui d'introduire la légalisation de la mère porteuse, c'est-à-dire la transformation de certaines femmes en poules pondeuses.

En ce qui concerne le cas soulevé ici. Première remarque: si deux homosexuels veulent des enfants, il y a un moyen très simple d'y parvenir, qui est traditionnel et même traditionnaliste en diable:rencontrer une femme et par la bonne vieille méthode éprouvée s'efforcer de faire rencontrer les gamètes males et femelles! Et vis-versa pour les homosexuelles. Pascale veut mettre de côté la question de l'homoparentalité. Mais c'est impossible. On ne peut pas, par un biais particulier quelconque, bouleverser ce qui organise et rend possible la vie. Si un homme (ou une femme) adopte un enfant tout en vivant avec un partenaire du même sexe, je vois pas en quoi cela exigerait que ce partenaire sexuel se trouve d'un seul coup affublé de droits sur cet enfant. Après tout la maîtresse d'un homme n'a aucun droit sur les enfants de l'épouse légitime et réciproquement... On mélange sexe et généalogie. Deuxième remarque: admettons que le parent (par ailleurs homosexuel-le-) décède, il suffira que son ami-e- demande la garde et l'adoption de l'enfant et je ne vois pas un tribunal assez stupide pour refuser cette nouvelle adoption... Ça fait des paperasses, en effet. Mais la paperasse juridique est la garantie de l'ordre généalogique, c'est-à-dire de l'ordre de l'institution de la vie humaine. Au moment où prévaut le "libre-service normatif" (comme le dit Pierre Legendre), la position que je défends ici paraît extrêmement "ringarde", j'en conviens, mais je n'en vois pas d'autre tenable.

Au fait, petite question. Admettons la reconnaissance de l'adoption pléniaire d'un enfant par un couple homosexuel, de qui l'enfant portera-t-il le nom?


Re: Parent(s)

Pascale - le 02-02-10 à 12:56 - #

 C'est peut être un peu dommage que les problèmes sociétaux suscitent plus d'intérêt que les problèmes politiques (je regarde le nombre de commentaires à votre article), mais je réponds tout de même à votre message, dont je vous remercie.

Il va sans dire que je suis contre la légalisation de la mère porteuse qui font de la mère et de l'enfant un objet de marchandages.

Dans un monde idéal, "l'enfant à adopter n'existerait pas": c'est tout à fait souhaitable, en effet, vous avez raison. Peut être aussi que dans un monde idéal, le couple homosexuel, délivré de la pression sociale et donc du désir normatif d'avoir, en tant que couple, un enfant, se tournerait vers d'autres sources de satisfaction. Peut être encore que le couple, la famille, tels que nous les connaissons aujourd'hui, seraient transformés (je pense aux écrits de Kollontaï, aux expériences malheureuses à ce que j'en ai lu des Kibboutz: des ébauches, des pistes peut être...). Dans un monde idéal, je persiste à penser que "le libre développement de chacun serait la condition du libre développement de tous" et que nous ne pouvons présager de ce qui se passerait dans l'ordre du privé.

Mais nous ne sommes pas dans un monde idéal et nous faisons face à une réalité qui, même paradoxale et récupérée n'en est pas moins une réalité à prendre en compte et qui fait débat. L'idée de faire se rencontrer un homme et une femme dans l'unique but de procréer ne me semble pas humaine. Certains le font pourtant, je le sais. Faut-il l'encourager?

Non, je parlais du couple homosexuel qui a envie d'avoir un enfant. Le couple homosexuel n'est pas fondé uniquement sur la sexualité. Moi, je veux bien que l'un des deux seulement ait la possibilité d'adopter, mais je trouve indispensable que chacun des deux membres du couple conserve son devoir (et pas seulement son droit) d'éducation et de protection. Et je ne suis plus assez naïve pour croire au bon sens d'un tribunal: j'ai une confiance toute relative en une justice qui de plus en plus a des jugements ressemblant à ce que dénonçait déjà La Fontaine: "Selon que vous serez puissant ou misérable...". Justice de classe qui peut atteindre aussi certains homosexuels. Donc sur ce point, autant légiférer clairement.

Vous posez ce problème du nom. Ma foi, c'est effectivement une question difficile et je n'ai pas de réponse toute faite. Le nom, peut être, de celui qui adopte et qui remplirait dans ce cas une fonction analogue à celle du père. De toutes façons, le problème doit être approfondi, pas évacué et les apports décisifs de la psychanalyse doivent, peuvent, être pris en compte.
Mais une dernière chose: la psychanalyse a apporté beaucoup, notamment parce qu'elle décrit ce que l'on se refusait à voir. Il faut faire attention aussi: elle a servi parfois de prétexte. Elle est un formidable outil d'analyse, explosif, qu'il faut manier avec de grandes précautions et utiliser avec beaucoup d'humilité.

Cordialement.


Olivier Montulet - le 11-05-11 à 15:30 - #

Je ne suis jamais déçu de lire Denis Collin. Je salue un certain courage qui l'anime dans sa résistance à la doxa. Je crois qu'il est indispensable que nous, résistants, nous nous reconnaissions tant le système, qui nous, citoyens, piétine tous, n'a pour nous, résistants, que mépris qui nous isole en rompant nos lien sociaux. Renforçons donc ces liens entre-nous.

Le texte, ici proposé, me conduit à deux interpellations.

- N'y a t'il pas dans cette reconnaissance de groupes -ciblés- de discriminés d'une part une sorte d'expiation de la faute de faire partie du groupe non discriminé et inversement une prise de gloire et de puissance des discriminés à l'encontre des non discriminés?

- La lutte contre la discrimination, dans le mouvement laïciste anticlérical, n'est telle pas avant tout orientée non pas par la volonté de reconnaitre les discriminés, mais par un combat contre les interrogations morales qui se portent à leur sujet au sein des religions? Il est surprenant que la question des handicaps* et des discriminations des handicapés, notamment dans la possibilité pour eux de vivre en couple, ne fasse pas tant débat sur la place publique.

* Je nuance d'emblée: Le débat a lieu mais dans les cercles restreints qui sont directement concernés, en rien sur la place publique. Et si débat parlementaire il y a sur le sujet c'est dans la discrétion alors que les débats autour de l'homosexualité, par exemple, bénéficient de force publicité. Le problème de la discrimination des handicapés n'a jamais été ouvert qu'au niveau de l'accessibilité et de la mobilité physique des handicapés. Les solutions proposées allant parfois jusqu'à devenir des contraintes pour les valides (pas d'escalier si pas d'ascenseur!) mais aussi en créant dès facto des discriminations au sein des handicapés... puisque les dispositifs proposés ne sont eux-mêmes accessibles qu'aux handicapés dont l'handicap leur permet l'usage du dispositif.